Débat préalable au conseil européen des 18 et 19 octobre 2012

Mme Barbara Pompili. Monsieur le président, messieurs les ministres, mesdames les présidentes des commissions, mes chers collègues, que ce Conseil européen ne se présente pas comme une énième réunion de la dernière chance est en soi un bon signe. Cela signifie que les décisions prises en juin dernier, sous l’impulsion française notamment, ont permis de faire sortir l'Union européenne d’une logique du fonctionnement par à-coups et de revenir à une gestion plus cohérente des affaires.

Nous formulons le vœu que cette gestion devienne régulière, comme le préconise le Président de la République. Il faut sortir enfin de cette succession de rendez-vous formels qui sont trop souvent autant de déceptions pour entrer dans un pilotage au long cours de l'Europe.

Ce sommet sera-t-il l'un des derniers du genre ? Nous l'espérons. Pour autant, il ne sera pas sans enjeux. Il y a d'abord ce rapport du président Van Rompuy, qui comporte quelques opportunités à saisir mais beaucoup d'hypothèques à lever. Nous ne nous faisons pas d'illusions excessives sur cet exercice de style, incomplet, qui ne constitue qu'une base de travail dont la conclusion ne sera pas écrite demain ni après-demain.

C’est plutôt sur les autres enjeux de ce sommet que je souhaite, au nom des écologistes, vous dire quelques mots.

Disons-le tout net : au cours des dernières semaines, le climat a changé. Aux avancées techniques obtenues en juin s'ajoute désormais une conscience de plus en plus répandue du danger que ferait connaître à nos économies – et aux comptes publics, c'est un comble ! – la tentation de l'austérité généralisée. Que Mme Lagarde, qui n'est pas réputée pour ses convictions keynésiennes, …

M. François Sauvadet. Qu’en savez-vous ?

M. Guy Geoffroy. C’est une interprétation !

Mme Barbara Pompili. …reconnaisse elle-même cette impasse est le signe de cette prise de conscience.

Si la rigueur est un impératif que nous devons collectivement assumer, l'austérité est sans avenir. L'Europe doit en tirer les conséquences. Cela suppose en premier lieu que les avancées arrachées en juin dernier soient confortées pour les unes, mises en œuvre pour les autres.

Ainsi, l'engagement que les conditions de la mise en œuvre des aides européennes n'aillent pas au-delà des recommandations déjà émises par la Commission européenne doit être rappelé. La situation espagnole demeure critique, tout le monde en convient, et les réticences ibériques à déclencher l'aide européenne demeurent fortes. Elles retardent la sortie de crise de l'Espagne, paralysent son économie et ont des conséquences pour nous tous.

Ces réticences sont certes le fruit d'un choix politique national, d'ordre idéologique. Mais ce choix politique ne vient pas de nulle part. Il puise sa justification dans une crainte qu'il faut entendre, et à laquelle il faut répondre : celle de voir le déclenchement du mécanisme d’aide assorti de conditions insupportables pour une société déjà extrêmement éprouvée par la crise, pour une économie que l'austérité a plongée dans la récession. Les décisions annoncées en juin avaient commencé à desserrer l’étau. Le sommet de demain doit dissiper définitivement cette menace de garrot budgétaire.

Rappeler les avancées de juin sera donc essentiel, mais pas suffisant. Il faut donner des signes, il faut rappeler un cap. De ce point de vue, rappelons que l'octroi d'un délai supplémentaire à la Grèce ne doit pas être vu comme une faiblesse, mais bien comme un acte de retour à un réalisme économique salvateur. Sans doute la question de la Grèce ne sera-t-elle pas réglée en un jour. Mais les décisions de novembre se préparent aujourd'hui et rien ne serait pire que de donner le sentiment, par des déclarations intempestives, d'ajouter des conditions aux conditions.

Chacun sait que l'Allemagne entre en année électorale, période qui n’est pas des plus propices à la construction de solutions durables. Raison de plus pour ne pas entrer dans des discussions qui ne seraient que des leurres et pour se concentrer sur la mise en œuvre effective des décisions annoncées. Je veux bien entendu parler de la question de la supervision bancaire, avancée majeure de juin, qui semble aujourd'hui marquer le pas.

S'il est une attente que nous avons, avant ce Conseil, c'est bien celle-là : préparer sans tergiverser plus longtemps un accord sur la supervision bancaire, qui aboutisse avant la fin de l'année. Les conditions d'une adoption rapide de la législation – début 2013 – doivent être réunies afin que la BCE devienne réellement le superviseur des banques européennes.

Lors du débat sur la déclaration générale du Premier ministre, il y a quinze jours, je vous avais indiqué clairement la manière dont, sur ces questions européennes, les écologistes entendaient se positionner. Nous aspirons à un autre fonctionnement de l'Europe et à un vrai saut fédéral démocratique. Mais nous savons que nous n'en sommes pas là. Compte tenu des modalités de fonctionnement actuelles de l'Union, aux grandes déclarations nous préférons les pas en avant, aux incantations les résultats concrets.

C'est donc essentiellement sur ces deux questions du rappel des conditions de déclenchement des plans d’aide et de la supervision bancaire que nous appuyons notre soutien à l'action de la France et que nous jugerons de l'utilité ou non de ce Conseil européen. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur quelques bancs du groupe SRC.)

Equipe de Barbara Pompili

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