
Barbara Pompili est intervenue en séance publique pour le groupe écologiste sur le projet de loi relatif à l'adaptation de la société au vieillissement.
Monsieur le Président, Madame La Ministre, Madame la rapporteure, Madame la Présidente de la commission, Chers collègues,
Je tiens tout d’abord à excuser l’absence de ma collègue Véronique Massonneau qui devait initialement prendre la parole sur ce texte mais qui ne peut malheureusement être parmi nous aujourd’hui.
Elle aurait souhaité dire combien ce projet de loi est une bonne nouvelle, en réponse à une bonne nouvelle. Il est suffisamment rare de tenir un tel discours à cette tribune pour le souligner. Car OUI, l’espérance de vie augmente dans notre pays. On vit plus longtemps, et c’est tant mieux. En 2035, les plus de soixante ans représenteront ainsi plus de 30% de la population française. Nos systèmes de santé et de protection sociale ont permis cette évolution et nous ne pouvons que nous en réjouir.
Bien sûr, ce constat ne doit pas faire oublier un autre enjeu : celui de l’espérance de vie « en bonne santé » qui doit nécessairement appeler une meilleure prise en compte des défis posés par la santé environnementale comme la qualité de l’air ou celle de notre alimentation pour ne citer que ces deux exemples. Car en matière de santé environnementale, les marges de progression sont immenses et il incombe aux législateurs mais aussi à l’ensemble des acteurs de notre société de prendre la mesure de ces défis, qui touchent particulièrement les personnes fragiles, et donc les personnes âgées. Les derniers épisodes de pollution de l’air nous el rappellent.
Toujours est-il que pour le moment, en France, l’espérance de vie augmente. Et ce constat implique des transformations dans notre société. Car une population qui vit plus longtemps, c’est une population qui doit s’adapter aux conséquences de ce vieillissement sur son mode de vie, sur NOTRE mode de vie. Je parle bien de NOTRE mode de vie car il ne s’agit pas de demander aux plus âgés de s’adapter à la société mais inversement, c’est à NOTRE société, c’est à NOUS de nous adapter aux besoins de ces personnes.
Et c’est tout le mérite de ce projet de loi, qui a pour ambition non pas de se concentrer uniquement sur les personnes âgées et les professionnels qui les accompagnent mais, au contraire, d’inclure chaque citoyen dans la prise en compte du vieillissement et de mobiliser toute la société afin qu’elle s’adapte à ses contraintes.
Je pense par exemple : à l’adaptation des logements aux besoins de la personne ; à leur accessibilité pour les personnes en perte de mobilité, mais aussi à l’accessibilité de leur environnement - tant urbain que rural. Je pense aussi au nécessaire soutien des aidants familiaux à organiser, ou encore à l’aide au maintien à domicile, un souhait souvent exprimé mais trop souvent refusé car les conditions de ce maintien ne sont pas rendues possibles. Voilà autant de mesures qui doivent se concrétiser dans les faits pour répondre aux besoins de ces personnes. Ces objectifs, que nous défendons depuis longtemps, nous les retrouvons dans ce texte et c’est une très bonne chose.
Car il s’agit de voir bien plus loin que les seuls objectifs économiques que certains appellent la « silver economy ». L’objectif premier doit être de renouer les liens humains avec des personnes souvent délaissées : permettre, par exemple, aux personnels soignant et aux aides à domicile de prendre le temps de nouer un vrai contact humain avec les plus âgés souvent isolés et en manque d’interactions sociales, dans une société où tout va toujours plus vite.
Ces dernières années, la question du vieillissement a été traitée seulement par des considérations financières. Elles sont importantes. Mais elles ne font pas tout. Je salue donc l’esprit de ce texte qui va enfin bien au-delà… même si nous aimerions aller encore plus loin par la mise en place d’un véritable service public de l’autonomie.
J’en profite aussi pour saluer le relèvement du plafond de l’APA, une des avancées majeures et concrètes de ce texte. Une réussite de la gauche au pouvoir en 2002, que je suis fière de pouvoir consolider aujourd’hui. La revalorisation à hauteur de 30% d’heures d’aides à domicile supplémentaires est une excellente nouvelle qui favorisera le maintien à domicile ainsi que le lien social avec les personnes les plus fragiles.
Je tiens à saluer également la réintroduction de la reconduction automatique de l’aide à la complémentaire santé (ACS), qui simplifie les démarches pour des personnes dont les formalités administratives deviennent de plus en plus contraignantes et conduisent parfois des retraités aux petits revenus à renoncer aux soins. C’est un enjeu de simplification et d’accès au soin auquel nous apportons une réponse concrète.
En revanche, nous avons quelques inquiétudes concernant la fusion annoncée des Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) au sein des Maisons de l’autonomie. Nous souhaitons des garanties pour que ces structures englobantes apportent les mêmes qualités de services et d’accompagnement aux personnes en situation de handicap. Nous défendrons en ce sens un amendement sur les MDPH pour s’assurer que la prise en compte du vieillissement ne se fasse pas au détriment de l'accompagnement des personnes en situation de handicap.
D’une manière générale, je regrette la quasi-absence dans ce texte de la prise en compte des personnes en situation de handicap qui sont bien sûr également concernées par les problématiques liées au vieillissement. Car la question de la mobilité des personnes âgées fait résonnance à celle des personnes en situation de handicap.
Je tiens d’ailleurs à rappeler aujourd’hui mon regret suite à l’adoption cet été des ordonnances sur l’accessibilité. Il n’est pas acceptable que de dérogation en dérogation, de délai supplémentaire en délai supplémentaire, l’accessibilité des transports, des voiries ou des établissements recevant du public soit sans cesse reportée. Cette situation conduit à l’exclusion de trop nombreux concitoyens à mobilité réduite, qu’ils soient en situation de handicap, simplement âgés, ou même parfois les deux à la fois. Nous ne pouvons pas faire de grands discours aujourd’hui prônant la société inclusive – et je m’y associe - sans dénoncer cette contradiction.
Enfin, je m’adresse particulièrement à Madame la Ministre, afin que vous nous apportiez les garanties du maintien des financements des structures d’accueil et d’aides aux personnes âgées notamment dans le contexte de la réforme territoriale et des profondes modifications quant aux collectivités compétentes. Cette question du vieillissement notamment en EHPAD n’est pas à prendre à la légère car c’est là une source d’inquiétude pour de nombreuses familles du fait du manque de places mais aussi d’un coût qui s’avère trop souvent exorbitant et d’autres collègues l’ont souligné.
Vous l’aurez compris, chers collègues, malgré quelques points sur lesquels nous restons vigilants et attendons des clarifications, nous abordons l’examen de ce texte avec intérêt et enthousiasme.
Nombreux sont les Français et les Françaises qui attendent que nous soyons à la hauteur de cet enjeu majeur.
Je vous remercie
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