
Vendredi 24 janvier, j’ai adressé mes vœux aux acteurs du territoire.
J’ai insisté sur le réel rôle d’une députée et sur mes deux priorités absolues pour 2020 : l’écologie et la démocratie.
Voici l’intégralité de l’intervention (évidemment il y a pu avoir quelques différences dans le prononcé)
Chers amis,
Je suis très heureuse de vous retrouver afin de vous présenter mes vœux pour cette nouvelle année.Comme tous les ans, je m'adresse à vous, représentants des forces vives de la circonscription : élus, représentants des institutions, des entreprises, des associations, ou encore des comités de quartiers, car les responsabilités que nous exerçons nous amènent à travailler ensemble régulièrement et à partager nos contraintes, nos doutes parfois, et surtout notre énergie au service de nos concitoyens.
Cette cérémonie de vœux ne sera pas l'occasion d'un inventaire, parfois un peu fastidieux, de toute l'activité parlementaire de 2019 et de celle de l'année à venir.
Ce serait long, peut être ennuyeux et ne permettrait pas de mettre l'accent sur ce qui me semble essentiel. L'activité parlementaire a été très dense et vous pouvez en trouver un résumé dans les différentes publications que je diffuse :
• la lettre de la députée 2 fois par an dans toutes les boites aux lettres,
• le site internet
• les réseaux sociaux actualisés quasiment quotidiennement,
• ainsi que la réunion annuelle de bilan de mandat en juin, accompagnée elle-même d'une publication spécifique.
Bien-sûr je reste avec mon équipe à disposition pour répondre à toute question.
Par ailleurs, les sujets sont si variés que le risque, évident, est de passer à côté de l'essentiel. C'est pourquoi, en tant que députée j'ai décidé de vous parler de ce qui m'apparait aujourd'hui comme deux priorités absolues : l'environnement et la démocratie.
Vous allez me dire : « mais enfin, Madame la députée, il y a des débats qui agitent notre
société, il y a des sujets d'actualités, vous ne pouvez pas les négliger ! »
Non, évidemment.
La réforme des retraites, en premier lieu, est un sujet important.
Tout autant que la question de l'emploi, de notre système de santé et
de l'avenir des hôpitaux, de l'autonomie et du grand âge, de la
jeunesse, des violences faites aux femmes, du handicap, de
l'audiovisuel, du numérique... et j'en oublie !
Quand on est député, on est interpellé, à juste titre, sur tous ces sujets ;
Parce qu'ils vont faire l'objet de loi sur lesquelles on devra se
prononcer, ... parce que notre rôle est aussi de faire l'intermédiaire
entre les problèmes rencontrés sur le terrain et la dimension nationale.
On est interpellé également sur bien d'autres sujets, en lien avec les
des difficultés personnelles que rencontrent nos concitoyens et qu'ils
viennent nous exposer dans nos permanences : situations de personnes
migrantes, logement, tracasseries administratives, financement
d'associations, entreprises qui s'implantent mais aussi recherches
d'emplois, problèmes de cartes scolaires ou même divorces et gardes
d'enfants !
Les sujets sont inépuisables. Car les députés sont au
cœur de la vie de notre société (contrairement à l'image tellement
fausse que certains peuvent avoir).
Alors bien évidemment avec ma petite équipe, j'essaie de répondre au mieux à toutes les sollicitations.
Ma petite équipe elle est présente ici à mes côtés :
• Emmanuelle Steuperaert, Quentin Willot, Sabine Tirmarche à Amiens
• Carine Lalmant et Marianne Greenwood à Paris
• Sans oublier ma chère suppléante Cécile Delpirou, soutien de
toujours et précieux conseil, notamment sur les sujets de droit social
et d'entreprises qu'elle connaît sur le bout des doigts en tant
qu'ancienne syndicaliste !
Donc avec mon équipe sur le plan local
nous répondons aux sollicitations, nous essayons d'aider les personnes à
résoudre les problèmes qu'elles nous soumettent. Nous relayons dans les
différentes institutions les questionnements ou dysfonctionnements qui
nous sont signalés. Nous nous faisons un point d'honneur à répondre à
toutes les demandes émanant du territoire de la circonscription.
Si nous ne répondons pas c'est que nous n'avons pas reçu le message ! A faire passer !
Et nous recueillons aussi les doléances, opinions, demandes qui nous
sont exposées sur les différents sujets de société ou d'actualité
nationale.
Et là nous en arrivons à la fonction de députée en tant que telle : l'élaboration de la loi, le contrôle de l'application de la loi ET le contrôle du gouvernement.
Vous avez vu l'étendue
des sujets. C'est très vaste. Trop pour croire sérieusement qu'un député
peut gérer correctement tous ces sujets.
C'est tout bonnement impossible.
Entre septembre 2018 et juillet 2019, 72 lois ont été votées. Depuis septembre 2019, 17 lois adoptées.
Nous devons donc nous répartir le travail et c'est pourquoi il existe 8 commissions permanentes qui se partagent les thématiques. Au sein de ces commissions, les députés se spécialisent et travaillent donc prioritairement sur certains sujets. Chaque député ne peut être membre que d'une commission.
Quand j'ai décidé de m'inscrire dans la
commission du développement durable et de l'aménagement du territoire et
quand on m'a fait l'honneur de m'élire à sa tête, j'ai fait le choix de
me consacrer donc prioritairement (et même quasi exclusivement) à ces
enjeux.
Sur les autres sujets, dont les retraites par exemple, mon
rôle est donc d'écouter mes interlocuteurs et de faire remonter les
infos aux députés spécialistes du sujet, qui sont membres de la
commission des affaires sociales de l'Assemblée, et qui vont travailler
au fond ce projet de loi. Ca ne m'empêche pas de m'exprimer publiquement
quand il me semble qu'il faut appuyer un point particulier, comme j'ai
pu le faire récemment sur l'âge pivot.
Mais vous me pardonnerez
de ne pas pouvoir ni vouloir me consacrer à ce sujet particulier car il
ne relève pas de ma commission ET des priorités auxquelles je veux me
consacrer.
Car ce projet sur les retraites (que je soutiens car il
veut vraiment recréer de nouvelles solidarités, adaptées au monde
d'aujourd'hui et dont j'espère qu'il aboutira notamment sur les critères
de pénibilité). Si finalement on réalise que cette loi n'est pas à la
hauteur, dans 5 ans, 10 ans, on la changera...
Alors qu'aujourd'hui ce qu'on fait ou qu'on ne fait pas pour le climat... c'est irréparable.
On ne pourra pas revenir en arrière. On pourra tout au plus réparer les dégâts... s'adapter...
Nous sommes à une époque charnière sur le climat, la biodiversité.
La conscience du problème est enfin générale, tout au moins sur le
climat. Même si quelques climatosceptiques continuent de nous mettre
collectivement en danger comme Messieurs Trump ou Bolsonaro...
Tout
le monde parle des incendies catastrophiques en Australie, des
inondations en Indonésie, de la déforestation, de la fonte des pôles...
Et tout le monde se rend compte que même chez nous, en France le
dérèglement climatique se fait sentir : canicules, inondations, recul du
trait de côte, incendies, conflits d'usages de l'eau...
Le travail à faire sur le sujet est immense ! Et urgent !
Et pourtant, justement parce qu'il y a toujours plein d'actualités, ce
sujet, essentiel se retrouve trop souvent au second plan.
Il y a
toujours plus urgent à régler. Et pour de bonnes raisons... C'est la
fameuse expression sur la fin du monde et les fins de mois.
Mais
cette expression est en fait terrible car évidemment quand notre monde
vivra les conséquences de ce dérèglement on ne parlera plus de fin de
mois mais de simple survie...
Et ce sont ceux qui veulent que rien
ne bouge qui font tout pour opposer environnement et économie,
environnement et social... alors que l'on peut concilier ces
impératifs. Il suffit de le vouloir et de se donner les moyens de le
faire.
Et dans ce domaine l'année 2020 sera cruciale :
– Au niveau international, des rendez-vous importants :
Biodiversité : Congrès mondial pour la nature qui se tiendra à
Marseille au mois de juin qui rassemble tous les 4 ans des milliers de
représentants de gouvernements, d'agences publiques, d'ONG, du monde
scientifique, des collectivités locales, des peuples autochtones et des
entreprises.
Objectif : renforcer les efforts de protection de la
biodiversité dans le monde et promouvoir les solutions pour relever les
défis les plus pressants de l'environnement et du développement durable.
Le fait que se congrès se tienne à Marseille met une grosse pression
sur la France, son gouvernement et son président pour être à la pointe
des mesures à prendre en termes de protection de la biodiversité.
Et
ce d'autant plus que se tiendra à la fin de l'année en Chine la COP 15,
considérée comme aussi importante pour la biodiversité que la COP 21
pour le climat.
2020 c'est l'année de la biodiversité...
Au niveau international on aura aussi la COP 26 sur le climat à Glasgow ou chaque pays devra revoir à la hausse ses engagements pris lors de la COP 21. C'est une COP très importante après l'échec de la COP 25 196 Etats plus l'Union Européenne y participent.
– Au niveau européen :
Ce sera l'année de la préparation de la réforme de la PAC :
Chaque Etat-membre de l'UE doit élaborer, d'ici la fin de l'année un
plan stratégique national pour la PAC post 2020. Dans ce cadre, un débat
public sera lancé à partir du mois de mars, le premier sur ce sujet.
C'est une occasion exceptionnelle de débattre sur l'avenir de notre
modèle agricole et alimentaire, sur le meilleur moyen d'accompagner nos
agriculteurs vers l'agroécologie et pour leur assurer un revenu stable
et durable. Je vous invite à saisir tous cette exceptionnelle
opportunité ! Sachant que l'agriculture représente 20% de nos émissions
de GES en France... (émissions des bâtiments : 25%, transports 30% )
– Enfin au niveau français
En consultation jusque fin février la Stratégie Nationale bas Carbone
(SNBC) qui donne une feuille de route pour la France dans sa lutte
contre les émissions de GES dans le but d'atteindre la neutralité
carbone en 2050. Cette feuille de route fixe des objectifs
intermédiaires dont on voit déjà qu'aujourd'hui ils seront difficiles à
atteindre du fait de l'abandon de la hausse de la taxe carbone.
En
consultation également la Programmation pluriannuelle de l'énergie qui
nous engage dans la réduction à 50% du nucléaire en 2035 mais aussi qui
programme le développement de toutes les énergies.
Nous voyons
aujourd'hui que nous ne sommes pas à la hauteur des enjeux. Nous
avançons certes. De lois ont été prise, sur la mobilité, sur le
gaspillage, sur l’énergie, qui vont dans le bon sens et qui vont
apporter des solutions à nos concitoyens.
Mais on doit aller plus vite. Lutter contre l'inertie, contre les lobbies.
La démarche lancée autour de la convention citoyenne pour le climat est une
expérience intéressante, ce tirage au sort de 150 citoyens qui buchent sur le sujet.
J'espère beaucoup que leurs suggestions rejoindront celles que nous
faisons et nous aideront à avoir plus de poids face à l'exécutif...
Nous devons aussi travailler sur la manière dont on peut mettre en place la transition écologique sur les territoires, justement pour accompagner tout le monde et la rendre possible sur le terrain.
Un pacte productif va être mis en place pour accompagner la transition ; encore faut-il qu'il accompagne les nouveaux métiers en mettant en place des formations etc mais aussi qu'il accompagne les métiers, les entreprises qui n'auront plus de débouchés à terme...
C'est pourquoi j'ai lancé avec ma commission plusieurs missions qui vont travailler avec les acteurs sur le terrain pour apporter des solutions sur les sujets suivants :
– La gestion des conflits d'usage en cas de manque d'eau
– les suites des assises de l'eau
– Le suivi de la fermeture de Fessenheim pour tirer des expériences de
ce cas pour tous les territoires qui vont se retrouver en transition.
– Le sujet de la reconversion des friches industrielles
– le problème de l'orpaillage illégal en Guyane qui mêle les questions
de déforestation et les questions de développement économique du
territoire
Parallèlement je suis associée à 2 groupes de travail organisés par le gouvernement :
- Sur l'artificialisation des sols (l'équivalent d'un département tous les 7 ans)
- Sur un développement équilibré de l'éolien.
Et j'ai été nommée membre du CA de l'Office Français de la Biodiversité. Qui va jouer un rôle croissant notamment dans ses liens avec les élus et les entreprises pour les aider à préserver et même reconquérir la biodiversité.
Voilà donc quelques exemples du travail qui m'attend cette année... Sans compter l'inévitable contrôle des suites de ce que nous votons, car dans notre pays on peut parfois oublier que c'est le parlement qui vote les lois et que ces lois doivent être respectées.
Un petit exemple récent qui justifie cette nécessité de vigilance constante.
Nous avons voté fin 2018 dans le budget un amendement qui retire à
l’huile de palme à partir de janvier 2020 son statut de biocarburant et
les avantages fiscaux qui y sont rattachés. Cette décision n’a pas plu à
Total au regard de son investissement dans l’usine de la Mède dans le
Sud de la France. Pourtant, au lieu de réfléchir à réorienter sa
production, à retravailler sur le modèle de cette usine (sachant que
l’huile de palme c’est pour fabriquer du biodiesel dont on sait que
l’avenir de la filière est peu assuré puisqu’on organise la sortie du
diesel...), Total a choisi de pratiquer un lobbying toute l’année pour
revenir sur ce vote.
Il a failli y parvenir fin 2019 à travers un
amendement qui est passé par surprise. Cela a fait du bruit et nous
avons obtenu un nouveau vote pour revenir à ce que nous avions voté l’an
dernier. Nous avons donc confirmé une deuxième fois notre volonté
claire que l’huile de palme et tous les produits qui y sont rattachés ne
bénéficient plus d’avantage fiscal.
Nous pensions enfin être
tranquilles et pouvoir profiter des fêtes de fin d’année quand nous
avons découvert, grâce aux ONG, qu’une note des Douanes confirmait une
partie de notre vote mais disait que certains résidus (ou coproduits),
les “PFAD” pouvaient toujours bénéficier de l’avantage fiscal. Comme par
hasard Total a prévu d’utiliser ces PFAD comme composants du biodiesel
produit à la Mède...
Nous avons vraiment peu apprécié, alors que
nous avons voté clairement par deux fois, que l’on essaie encore de
contourner notre vote. Nous avons écrit un courrier au Premier ministre
et une réunion a été organisée cette semaine au ministère.
L’affaire n’est pas terminée...
Le respect du vote du parlement élu c'est une des bases de notre démocratie. Que certains le méprisent et essaient sans arrêt de le contourner est inacceptable.
Et c'est le dernier point que je souhaitais aborder en cette nouvelle année...
l’avenir de notre démocratie...
Comme beaucoup je suis inquiète en voyant se dégrader le débat public dans notre pays.
Je suis inquiète en voyant se développer la haine de l'autre, la
difficulté de plus en plus grande d'accepter le débat contradictoire, de
respecter une opinion différente.
Comme je l'ai dit lors de
certaines cérémonies de vœux, on en arrive au combat des gentils contre
les méchants, les théories du complot fleurissent, la violence se
développe.
Il n'est plus possible dans de nombreux cas de simplement regarder les faits.
Par exemple aujourd'hui tous les indicateurs économiques nous disent
• Que le chômage baisse,
• Que des emplois industriels sont enfin à nouveau créés.
• Les baisses d’impôts sont réelles pour les premiers et deuxième décile,
• La taxe d'habitation baisse et va être supprimée.
• Les plus faibles ont droit systématiquement à une complémentaire santé. • Les minimas sociaux sont relevés.
• Les lunettes, soins dentaires et même bientôt les aides à l'audition vont être complètement remboursés. Etc etc.
Et pourtant, clairement on s'enfonce dans la sinistrose, le repli, la méfiance, la violence.
On pourrait discuter longtemps sur les raisons de tout cela :
– Perte de sens
- Plus de confiance en l'avenir
– Plus de confiance dans les politiques sur leur capacité à agir et même à avoir
une vision
– Le sentiment de distance avec les décideurs, de ne pas être suffisamment
associé à la décision. Le sentiment d'un mépris, d'un manque d'écoute..
– La méfiance vis à vis des médias
– Le développement des réseaux sociaux avec leurs corollaires de fake news, de
dictature de l'immédiateté qui incitent à la réaction plutôt qu'à la réflexion.
On peut s'accorder sur le fait que tout cela ne sent pas très bon. Les populismes se développent. Nous ne sommes pas à l'abri de voir la démocratie mourir, et pire de perdre notre humanité.
Nous célébrons les 75 ans de la libération du camp d'Auschwitz.
Et comme l'a dit Jacques Attali récemment : « n'oublions jamais qu'une
nation civilisée a produit des milliers de monstres décidés à
exterminer des millions d’êtres humains ; et que d'autres nations
civilisées n'ont rien fait pour accueillir ou protéger ceux qui étaient
menacés, ni pour interrompre leur massacre. »
Malgré tout il y a des notes d'espoir. Certains regrettent le désengagement dans les partis politiques, dans les associations ou les syndicats. Mais d'autres formes d'engagement naissent. Sur le climat, sur des causes ponctuelles.
Une demande très forte d'association aux décisions se fait jour. Et aussi de transparence. Le monde change, nous devons nous y adapter.
Les grands débats, la convention citoyenne sur le climat sont autant de
tests, d'essais. A nous d'inventer, de multiplier ces essais et de
trouver comment leur donner des
suites. Comme réarticuler cela avec
des institutions plus transparentes, plus claires sur leurs pouvoirs ;
je pense qu'il faut aussi rendre du pouvoir au parlement pour lui
permettre d'être plus respecté par les citoyens et le gouvernement.
Renouveler la vie politique, favoriser l'engagement de tous par un
statut des élus qui permette à toutes les catégories
socioprofessionnelles, tous les âges, mais aussi aux femmes de lever les
obstacles à leur engagements.
Bref recoudre la confiance.
Chacun doit s'y mettre, les élus en premier, évidemment. Mais aussi en passant le message que la démocratie c'est l'affaire de tous et que se déresponsabiliser en se reposant sur les autres, ce n'est pas être citoyen.
Il y a 30 ans, pour ses premiers vœux en tant que président, Vaclav Havel disait : « La liberté et la démocratie, cela signifie la participation et la responsabilité de tous. Si nous nous en rendons compte, l'espoir reviendra dans nos cœurs. »
Je reprends à mon compte cette citation merveilleuse, si visionnaire et si actuelle.
Et je vous adresse, de tout mon cœur, mes meilleurs vœux de bonheur et de santé, avec l'espoir et l'envie que nous continuions, ensemble à œuvrer, à notre niveau, pour rendre ce monde plus beau.
Commenter